Des lettrages colorés accompagnés par des persos rigolos… Pour Sank, pas besoin de se prendre au sérieux pour réaliser des compositions élaborées en équipe, l’essentiel étant de passer du bon temps avec ses potes.

Rencontre à Toulouse, entre Toons déglingués dans un univers Pixar distordu…

Peux-tu te présenter ?

Sank ou Sank86, je suis membre des 3G, des BBQ’S, des CRAZY PARTNERS que j’ai créé en 2014 avec Wca2, Sider, Wen2, Worm, Jone, Bulea et Rokse. Je suis également membre des LCF depuis cet été.

Comment as-tu commencé à peindre ?

Fin 2001, à Brest en Bretagne d’où je suis originaire. On devait être en seconde et mon pote Zenit s’y intéressait beaucoup. Il avait tout un tas de magazines comme Radikal ou Xplicit Grafx. J’étais bien à la traîne, ma culture Graffiti s’arrêtait aux chromes que je voyais dans ma ville, en particulier ceux de Mel et Neck. On a peint nos premières pièces dans des endroits perdus et sur des nacelles de la SNCF… mauvaise idée.

Quelques mois plus tard on se fait choper à prendre nos photos, on avait seize ans et pas trop de raisons d’être sur les rails. Juge des mineurs et amende, bref le démarrage a été un peu compliqué, surtout pour nos parents qui ont découvert ce qu’on faisait de nos soirées.

C’est à partir de ce moment-là qu’on a commencé à peindre en terrain, au port de commerce, et surtout à rencontrer d’autres graffeurs. Ce fut le déclic, voir cette émulation, cette effervescence de styles, une claque. A Brest, début 2000, il y avait beaucoup de monde et du niveau, les C29, GK, WW, ARS, pour ne citer qu’eux. Il a fallu faire ses armes et quand Neck, Amon ou Otar m’ont proposé de peindre à leurs côtés la nuit, j’ai pris les choses beaucoup plus au sérieux.

En parallèle, je peignais avec Wca2 qui est un peu le papa brestois. Grâce à lui, j’ai acquis quelques techniques j’ai commencé à bosser mon lettrage, il m’a aussi permis de pouvoir peindre sur des fresques plus travaillées. J’essaie d’apprendre des gens avec qui je peins comme Jone, Wen2, Reso ou encore Pax49 avec qui j’ai passé énormément de temps.

Quelles sont tes sources d’inspiration ?

La plupart de mes références viennent du Graffiti, des lettrages colorés avec du mouvement. C’est encore mieux s’il y a un univers Cartoon ou des persos marrants qui complètent le tout. J’aime aussi pas mal d’illustrateurs que je découvre sur Internet, les livres pour enfants de mon fils ou l’univers Pixar.

D’où te viennent les idées pour les persos ?

C’est souvent de la reproduction, que j’adapte à ma pièce. L’objectif est que le perso s’incruste comme si c’était une phase ou un bout de mes lettres. J’essaie au mieux de mélanger l’ensemble. Quand c’est de la création pure, ça dépend. Par exemple, en allant peindre à la Rochelle, je trouvais marrant de faire des animaux marins chercher la plage ou de faire un moustique débile l’été, ou encore m’inspirer de mon fils qui me demande « papa, je veux un crocodile qui conduit un engin ». Ça dépend de l’humeur, mais c’est jamais sérieux.

Avec qui peins-tu ?

Je vis à Toulouse depuis trois ans. Je connais Rokse et Atsak qui m’ont présenté Toncé et Rake.

C’est devenu des potes. Pour Reso, on a fait notre premier mur ensemble en 2005, puis en 2009 lors de ses visites en Bretagne. Toncé nous a remis en contact. Il m’a fait visiter son atelier au 55 où il m’a présenté Panks avec qui le feeling est tout de suite passé.

J’ai aussi rencontré Nuans grâce à Instagram. Depuis, on a fait pas mal de murs a deux. Je suis toujours partant pour rencontrer de nouvelles personnes pour peindre, c’est ça aussi le Graffiti. Quand je remonte en Bretagne, j’essaie de peindre avec les CRAZY PARTNERS, mais j’aime aussi peindre avec mon pote Akost. Je retrouve les DZB autour d’une bière et de quelques pizzas. La plupart de mes amis viennent du Graffiti, donc quand je remonte j’essaie de passer un moment avec eux. Évidemment quand des Bretons descendent dans le Sud, on se fait des murs, comme avec Mites, Arcko, Toncar, Otis86, et mon vieux pote Seim.

En ce moment vous faites pas mal de prods à plusieurs, avec les LCF, non ?

Je peins principalement avec Panks et Reso, mais il peut aussi y avoir d’autres graffeurs avec nous comme Twone. On discute souvent avant des couleurs puis on improvise sur le mur, ça rigole pas mal. On essaie de trouver une cohérence entre les pièces, ce qui est assez facile comme nos styles sont proches. Reso a environ mille idées à la minute, donc c’est assez cool. On fait ce qu’on aime, des bandes colorées, passer du temps ensemble même si chacun d’entre nous a ses obligations à la maison donc faut pas traîner, le réveil sonne tôt le dimanche matin !

Peins-tu exclusivement des murs ?

Principalement, j’aime les bandes en terrain. Mais en parallèle j’ai toujours été actif sur les grands axes, périph, rocades, voies ferrées ou zones industrielles. J’essaie quand c’est possible de le faire en couleur ou en négatif pour me démarquer des autres pièces. Toulouse est une ville très active, toutes les semaines il y a de nouvelles pièces qui fleurissent le long de la rocade, et les pionniers sont toujours présents à l’instar de Tilt, Sike… Ça motive. Je suis souvent partant pour accompagner des potes en dépôt, mais j’ai une affection particulière pour les cabanes de chantier, le support et la mobilité.

Plutôt jam, terrain ou spot vierge ?

Une pièce terrain à trois ou quatre, c’est juste parfait. Mais un spot abandonné, avec une histoire, des archives que tu explores avant de peindre pour trouver des supports inédits, comme un cours de squash avec Rake, c’est juste dingue. Même si tu peux te faire dégager par une trentaine de mecs en Airsoft qui menacent d’appeler les flics…

Quelle importance accordes-tu au sketch ?

Je dessine beaucoup. Je pense que c’est le seul moyen d’évoluer, sinon tu tournes vite en rond. Par période il n’y a rien qui vient et parfois c’est plus prolifique, donc j’en profite au max.

Participes-tu à des expos ?

Très peu. J’en parlais l’autre jour avec Toncé, j’ai pas encore de concept et je veux pas faire du Graffiti sur toile, en tout cas pas dans le sens lettrage/contour/bubbles. Donc, j’y réfléchis un peu, mais c’est pas ma priorité. Pourtant dans mon équipe brestoise ils sont nombreux à exposer : Worm, Wen2, Wca2. A Toulouse, avec Mister Freeze, c’est encore autre chose…

Des projets ?

Aller encore plus loin du côté de l’illustration, bosser mes pièces comme des compositions. J’ai encore du taf pour arriver à ce que je veux. Mais surtout kiffer avec mes potes et peindre avec eux !